Serafino Malaguarnera - Psychologue, Psychanalyste, Psychothérapeute à Bruxelles Av. d'Itterbeek, 9 - 1070 Bruxelles - Av. Louise, 505 Ixelles |
EmotionExtrait de “Dictionnaire de neuropsychanalyse" de Serafino Malaguarnera, 12 octobre 2016, pp. 149-152. Anglais : Emotion L’émotion est un ensemble de réponses organiques sous forme de manifestations expressives, physiologiques et subjectives spécifiques. Les émotions de base sont les réactions émotionnelles universelles, car elles proviennent de connexions cérébrales innées. Les structures impliquées dans la production des émotions sont les mêmes qui contrôlent et régulent les fonctions biologiques et se trouvent donc au niveau du tronc cérébral moyen et supérieur. Plus précisément, ces structures sont : l’hypothalamus, l’aire tegmentale ventrale, les noyaux parabrachiaux, la substance grise périaqueducale (SGP), les noyaux du raphé, le locus coeruleus et la formation réticulée. --------------------------------------------- Antonio Damasio envisage la capacité d’expression et de perception des émotions comme une fonction liée à la régulation biologique qui mettrait en relation les processus rationnels et non rationnels, et les structures corticales et sous-corticales. Il propose une distinction entre trois types d’émotion : les émotions d’arrière-plan, les émotions primaires et les émotions secondaires ou sociales (Damasio, 1995). Les émotions d’arrière-plan sont, bien qu’elles soient importantes, celles qui n’apparaissent pas directement dans le comportement de l’individu. Les émotions primaires sont celles très connues et bien établies par la tradition qui traite ce sujet : la peur, la colère, le dégoût, la surprise, la tristesse et le bonheur. Ces émotions primaires sont innées et dépendantes du système limbique. Les émotions sociales comprennent la sympathie, l’embarras, la honte, la culpabilité, l’orgueil, l’envie, la gratitude, l’admiration, l’indignation et le mépris. Ces émotions secondaires ou sociales sont apprises et dépendantes du système limbique et des cortex préfrontaux et somato-sensoriels. Antonio Damasio (Damasio et coll., 1998 ; Damasio, 1999) propose ensuite une différenciation entre émotion et sentiment (1). À partir des années nonante, les travaux d’Antonio Damasio montrent que les émotions jouent également un rôle important dans la sphère cognitive, notamment dans la prise de décision (2). Ces travaux montrent également que la conscience s’enracine dans le corps, et plus précisément dans la sphère des émotions, lorsqu’il développe la notion de conscience-noyau qui donne lieu au couplage entre les informations du monde interne et celles du monde extérieur (3). --------------------------------------------- Jaak Panksepp propose le terme e-motion (evolution motions) pour indiquer les émotions de base parce qu’elles sont apparues avant l’homo sapiens et constituent le génotype des mammifères. Il décrit (Panksepp, 1998) cinq systèmes et deux sous-systèmes de commande des émotions de base commune à l’animal et à l’homme : recherche/désir, rage/colère, peur/anxiété, passion/sexuel, panique/détresse de séparation, soins/dévouement maternel, jeu/bagarre. Ces systèmes de commande des émotions sont innés, mais sont modifiables par des mécanismes d’apprentissages localisés dans les lobes frontaux. Le système exploratoire (Seeking system), déjà connu sous le terme de système de récompense, est le système qui nous pousse à explorer notre environnement avec intérêt et curiosité. L’activité d’exploration donne la sensation de trouver une récompense ou du plaisir. Ce système, qui est à l’origine de tous les autres, est fortement activé pendant la recherche d’assouvissement des besoins primaires, lors d’excitation sexuelle, pendant le jeu et dans certaines formes d’agression. La structure cérébrale impliquée dans le système exploratoire est l’aire tegmentale ventrale qui projette les axones sur la partie dorso-latérale de l’hypothalamus jusqu’au noyau accumbens. D’autres projections investissent le gyrus cingulaire antérieur, des aires corticales frontales et l’amygdale. La dopamine est le neurotransmetteur du système d’exploration. Le système de détection du système exploratoire n’a pas d’objets prédéfinis ou innés, qui est une caractéristique que la psychanalyse nomme anobjectale. Le système exploratoire est donc un système non spécifique qui est seulement programmé pour la recherche ou l’exploration. Une lésion des parties cérébrales impliquées dans le système exploratoire comporte une perte d’intérêt envers l’environnement, une cessation des rêves et des symptômes chez un psychotique. Et inversement, une stimulation de ces parties cérébrales induit une augmentation de l’intérêt envers l’environnement, des rêves et d’une possible apparition de symptômes psychotiques (Solms et Turnbull, 2002). Pour bien fonctionner, le système exploratoire doit interagir avec d’autres systèmes, notamment avec la mémoire qui fournit la représentation des objets satisfaisants qui ont procuré dans le passé un plaisir grâce à un mécanisme de récompense. Ce mécanisme de récompense appartient à un sous-système que Jaak Panksepp appelle sous-système de désir (Lust Subsystem) qui produit des sensations de plaisir et désactive le système d’exploration au profit de comportement de consommation. Les structures cérébrales impliquées dans ce sous-système sont l’hypothalamus, qui est relié à la base du prosencéphale, et les connexions vers l’hypothalamus antérieur et médian qui se terminent dans la partie dorsale de la substance grise périaqueducale (SGP). L’endorphine est le neuromodulateur de contrôle principal du sous-système de désir. Le deuxième système, appelé système de défense-attaque (Rage system), s’active lorsque les pulsions ne sont pas satisfaites et manifestent des états de frustration provoquant des sentiments de colère et des comportements agressifs. Les structures cérébrales impliquées dans ce système sont le noyau médial du complexe amygdalien, le noyau septal de la strie terminale et l’hypothalamus (avant, ventromesiale et périfornical). Le troisième système est celui de défense-fuite (Fear system) qui génère des sentiments de peur et anxiété, et des comportements de fuite. Les structures cérébrales impliquées dans ce système sont les noyaux latéral et central du complexe amygdalien et ses connexions vers l’hypothalamus antérieur et médian qui se terminent dans la partie dorsale de la substance grise périaqueducale (SGP). Le quatrième système est le système panique (Panic system) qui génère l’angoisse-panique et les sentiments de tristesse et de perte. Ce système est également impliqué dans les phénomènes d’attachement, car il s’active lorsqu’il se produit une séparation de l’objet aimé. Les structures cérébrales impliquées dans ce système sont le gyrus cingulaire antérieur et ses connexions avec le thalamus, l’hypothalamus, la strie terminale, l’aire tegmentale ventrale et la substance grise périaqueducale ventrale (SGP). Les liens étroits, mis en évidence par la psychanalyse, entre les attaques de paniques, l’angoisse de séparation et l’affect dépressif sont appuyés par des recherches sur ce système panique. Jaak Panksepp ajoute un sous-système de soins infantiles qui conditionne les comportements de l’enfant et de la mère. D’un point de vue neurochimique, ce système est surtout sous l’influence de l’ocytocine et la prolactine qui augmentent chez la mère lors de la dernière période de gestation pour favoriser le lien avec le bébé. Le dernier système est le système du jeu (Play system) qui influence les comportements de jeu. Jaak Panksepp accorde au désir sexuel une place importante parmi les systèmes émotionnels (5). La première conférence internationale de neuropsychanalyse a eu lieu à Londres dans le Royal College of Surgeons, sous les auspices du Centre Anna Freud, du 21 au 23 juillet 2000, autour du thème : Perspectives neuroscientifiques et psychanalytiques sur l’émotion (5). Selon Mark Solms, les mécanismes fondamentaux de l’émotion sont un thème propice pour entamer un dialogue constructif entre les neurosciences et la psychanalyse. Antonio Damasio a souligné trois notions fondamentales : le point de vue évolutionniste, le point de vue holistique et l’homéostasie de l’individu. L’émotion participe, d’une manière importante, à l’homéostasie de l’individu. Il a repris la distinction entre l’émotion — visible par un tiers et mesurable — et le sentiment, qui n’est pas visible et permet la connaissance consciente des émotions. Selon Douglas Watt, la psychanalyse offre un bon aperçu des émotions, car elle les étudie in vivo et elles sont au centre de son intérêt. Selon Mark Solms et Oliver Turnbull (2002), une des fonctions principales de l’émotion est de nous renseigner, comme le font les organes sensoriels pour le monde extérieur, sur le monde intérieur, et plus précisément sur l’état du soi corporel. Cependant, contrairement à la modalité sensorielle, l’émotion est une fonction état (1) et l’objet et la perception de l’émotion sont subjectifs (Solms et Turnbull, 2002). L’émotion serait donc également la réponse subjective à la perception d’un événement. Si nous supprimons toutes images sensorielles, l’émotion est l’aspect de la conscience qui perdure. Ces auteurs proposent de considérer l’émotion comme un sixième sens parce qu’elle contrôle différentes fonctions du cerveau. ________________ 1. Voir : Affect 2. Voir : Marqueurs somatiques 3.Voir : Conscience 4. Voir : Panksepp Jaak 5. Perspectives neuroscientifiques et psychanalytiques sur l’émotion, compte rendu de la première conférence internationale de neuro-psychanalyse, Londres, 21-23 juillet, Carnet Psy, 2000, 57, p. 19-20. Bibliographie : Ba?ar E. (2010), Brain-Body-Mind in the Nebulous Cartesian System: A Holistic Approach by Oscillations, Springer Science & Business Media. Damasio A. R. (1995), L’Erreur de Descartes : la raison des émotions, Odile Jacob. Damasio A.R, Grabowski T.J., Bechara A., Damasio H., Ponto L.L.B., Parvizi J., Hichwa R. D. (1998), Subcortical and cortical brain activity during the feeling of self-generated emotions, Nature Neuroscience, 3, 1049-1056. Damasio A. R. (1999), Le Sentiment même de soi : corps, émotions, conscience, Odile Jacob, 1999. Panksepp J. (1998), Affective Neuroscience: The foundations of human and animal emotions, New York, Oxford University Press. Solms M., Turnbull O. (2002), Le cerveau et le monde interne, PUF, 2015. Compléments : Affect, Endorphine, Damasio Antonio, Formation réticulée, Locus coeruleus, Substance grise périaqueducale (SGP)
Catégories pouvant vous intéresser :Autres publications pouvant vous intéresser :ReconsolidationAnglais : Reconsolidation La reconsolidation est un troisième processus de la mémoire qui est récemment étudié. La reconsolidation est un processus de la mémoire qui réactive les souvenirs déjà stockés dans la m&eacu... IrritabilitéAnglais : Irritability L’irritabilité est un état psychologique enclin aux réactions de colère. ... Plasticité cérébraleVoir : Plasticité neuronale ... Plasticité neuronaleExtrait de “Dictionnaire de neuropsychanalyse" de Serafino Malaguarnera, 12 octobre 2016, pp. 352-354. Anglais : Neuroplasticity La plasticité neuronale (neuroplasticité ou plasticité cérébrale) est une propriété du... |
Vidéo : Nouveauté - Lacan et Pascal: La topologie de la jouissance
|
||
---|---|---|---|
Copyright © 2018 Psychologue Bruxelles. Serafino Malaguarnera |