A partir du 9 février 1972 (1), Lacan appelle « Nœud Borroméen » le nœud qui tient ensemble les trois registres, à savoir le symbolique, l’imaginaire et le réel.
Tous les biographes de Lacan situent l’acte de naissance du nœud borroméen à la séance de son séminaire …Ou pire du 9 février 1972. Le choix du nom se fit lors d’un dîner, au cours duquel il avait appris par Valérie Marchant, jeune mathématicienne, l’existence des armoiries de la famille Borromée (2) :
« Les armoiries de cette dynastie milanaise étaient constituées de trois ronds en forme de trèfle, symbolisant une triple alliance. Si l’un des anneaux se retire, les deux autres sont libres, et chaque rond renvoie à la puissance d’une des trois branches de la famille. Charles Borromée, l’un de ses plus illustres représentants, avait été un héros de la Contre-Réforme. Neveu de Pie IV, il avait transformé au XVIième siècle les mœurs du clergé dans le sens d’une plus grande discipline. Durant l’épidémie de peste de 1576, il s’était illustré par sa charité et, à sa mort, le protestantisme était en partie écarté de la Haute-Italie. Quant aux fameuses Iles Borromées, situées sur le Lac Majeur, elles furent conquises un siècle plus tard par un comte Borromée qui leur donna son nom et fit d’elles l’un des paysages les plus baroques de l’Italie ».
Depuis la publication des Ecrits, Lacan s’est employé à trouver une formalisation de sa propre théorie fondée sur l’imaginaire, le symbolique et le réel sans y parvenir. C’est à partir de 1972, que Lacan voit dans le nœud borroméen une possibilité de formalisation qui est un moyen d’universaliser sa théorie sans les inconvénients de la langue. Le nœud est, en outre, un objet mathématique qui lui permet de surmonter les limitations de la logique binaire et d’approcher une logique qui puisse articuler les trois registres ensemble. Au fur et à mesure qu’il avance dans cette voie, Lacan crée une nouvelle façon de penser la clinique analytique pour résoudre les questions essentielles de la pratique analytique. Les combinatoires possibles des nœuds présentent des articulations de la pratique analytique encore inconnues. Au fur et à mesure qu’il avance dans cette voie, Lacan crée une nouvelle façon de penser la clinique analytique pour résoudre les questions essentielles de la pratique analytique. Pour avancer dans cette recherche concernant la topologie des nœuds, Lacan va s’entourer de jeunes mathématiciens de la même génération que J.-A. Miller : Pierre Soury, Michel Tomé, Jean-Michel Vappereau.
Dans le nœud borroméen, le réel, symbolique et imaginaire – représentés par trois anneaux – sont distincts et ne font pas chaîne l’un avec l’autre. Ainsi, le nœud borroméen réalise un lien entre ces trois registres sans être enchaînés : une seule coupure d’un des trois annaux suffit pour libérer les autres.
L’écriture du nœud borroméen nécessite une « mise à plat » qui fait apparaître des places assignées à certains éléments concernant le sujet.
- Le sens se situe au niveau où le symbolique recouvre l’imaginaire. Cependant, le nœud montre que le réel intervient aussi, mai l’effet de sens de l’interprétation analytique peut être aussi réel.
- La jouissance du phallus se situe dans l’intersection des cordes du symbolique et du réel, amputée de l’espace d’imaginaire que vient y soustraire l’objet a.
- La jouissance de l’Autre se situe dans l’intersection de l’imaginaire et du réel, amputée de la part de symbolique soustraite de l’objet.
- L’objet a trouve sa place au niveau centrale : il assure le coincement des trois registres et, en même temps, sa place est crée par eux.
Bibliographie
1. Lacan J., Séminaire XIX, … Ou pire, inédit.
2. Dal-Palu B., L'énigme testamentaire de Lacan
Jean-Louis Sous, Les p'tits mathemes de Lacan